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Droit Fiscal - Acte anormal de gestion

Par une décision rendue le 11 mars 2022, le Conseil d’Etat a jugé que la société Alone et Co n’a pas commis d’acte anormal de gestion en consentant une promesse unilatérale de cession de titres à un dirigeant de sa filiale et en lui cédant ultérieurement les titres à une valeur inférieure à leur valeur réelle. Pour déterminer la normalité de l’acte de gestion, le Conseil d’Etat s’est posté, non pas au moment de la vente des titres, mais bien au moment de la signature de la promesse de vente. Notre équipe fiscale fait le point sur cette décision et ses conséquences.

Par une décision rendue le 11 mars 2022 (CE, n°453016 Société Alone et Co), le Conseil d’Etat a précisé les modalités d’application de sa décision Croë Suisse (CE plén. 21 décembre 2018, n°402006) dans laquelle il avait appliqué une dialectique ternaire aux règles de preuve relatives à la détermination d’un acte anormal de gestion portant sur la cession d’un élément d’actif immobilisé.

En 2009, une société holding (SARL Alone et Co) a consenti au directeur commercial de l’une de ses filiales (SAS Soréal-Ilou) une promesse de cession de titres de cette dernière au prix de 1 € par action. Ce prix correspondait au prix de marché de l’action à la date de conclusion de la promesse. En 2011, le directeur commercial a, en application de la promesse, acquis ces titres à 1 €, soit à un prix significativement inférieur à leur valeur vénale de 3,838 € au moment de la cession des titres.

Par cette décision, le Conseil d’Etat rappelle (i) que l’administration n’a pas à se prononcer sur l’opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, et (ii) que si l’administration démontre que le prix de cession est significativement inférieur à la valeur vénale de l’objet de la cession, l’anormalité de l’acte pourra être écartée si le contribuable démontre la nécessité qu’il avait de procéder à la cession à un tel prix ou qu’il en avait tiré une contrepartie.

Au cas d’espèce, le Conseil d’Etat a jugé que la société Alone et Co n’a pas commis d’acte anormal de gestion en consentant une promesse unilatérale de cession de titres à un dirigeant de sa filiale et en lui cédant ultérieurement les titres à une valeur inférieure à leur valeur réelle. Il a considéré que la société a agi dans son propre intérêt en cherchant à inciter son directeur commercial à s’impliquer davantage, obtenir de meilleurs résultats et ainsi augmenter la valorisation de sa participation dans sa filiale.

Pour déterminer la normalité de l’acte de gestion, le Conseil d’Etat s’est posté, non pas au moment de la vente des titres, mais bien au moment de la signature de la promesse de vente. La Haute Juridiction a écarté les arguments de l’administration tirés de l’absence de qualité de salarié du dirigeant bénéficiaire de l’option, de l’absence de condition de durée de présence dans l’entreprise ou de durée minimale de conservation des titres acquis dans la promesse et du caractère prévisible de l’accroissement de la valeur des titres de la filiale dès l’année de la promesse indépendamment de l’action de l’intéressé.

Ainsi, en décidant que c’est à la date de la promesse de cession des actions qu’il convient de se placer pour apprécier si la société commet un acte anormal de gestion et que l’administration doit démontrer que l’attribution de l’option d’achat ne se rattachait pas à une gestion commerciale normale, c’est-à-dire que la société n’obtenait aucune contrepartie, le Conseil d’Etat renforce la sécurité juridique des entreprises recourant aux mécanismes d’intéressement de leurs dirigeants et salariés.

Toutefois, si cette décision vient renforcer la sécurité juridique des entreprises qui accordent des management packages à leurs dirigeants et salariés, cela ne supprime pas le risque de requalification des plus-values de cessions des titres en salaire par les bénéficiaires des plans. Pour rappel le Conseil d’Etat a rendu 3 décisions le 13 juillet 2021 (CE, 13 juillet 2021, n°428506 ; n°435452 ; n°437498) définissant clairement le raisonnement à suivre pour déterminer la nature des revenus réalisés par un salarié bénéficiaire d’un management package.

Photo par Adeolu Eletu sur Unsplash
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