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Droit de la Propriété Intellectuelle | Un nouveau rebondissement judiciaire pour la commune de Laguiole

Victoire pour Laguiole, village de l’Aveyron célèbre pour ses couteaux au manche siglé d’une abeille, qui depuis le 5 mars dernier tire avantage de la décision de la Cour d’Appel de Paris qui a annulé vingt marques reprenant la dénomination « Laguiole ».

Cela faisait plus de vingt ans que la commune se battait contre un entrepreneur du Val-de-Marne qui en 1993 déposa en France le nom Laguiole pour désigner notamment des couteaux, du linge de maison, des vêtements et des engrais. La gamme de produits commercialisés sous ce nom ne provenait aucunement de la commune Laguiole, la plupart d’entre eux étant des produits importés. Les déposants n’étaient pas non plus des administrés de cette commune.

C’est ainsi que les artisans du village de Laguiole se sont vus privés de la possibilité de fabriquer ou commercialiser des produits sous la dénomination « Laguiole » sans être poursuivis pour contrefaçon. « Avec un produit pourtant local, j’aurais été déclaré contrefacteur, parfois même contre des produits chinois », explique Thierry Moysset, gérant de la Forge de Laguiole, société fabricante de l’ « authentique » couteau Laguiole.

En 2010, la commune porte alors l’affaire devant le Tribunal de Grande Instance de Paris espérant obtenir l’annulation des marques « Laguiole ». Elle est déboutée de ses demandes et le jugement est confirmé en appel en 2014. Pourtant, fin 2016, la Cour de Cassation introduit un nouvel épisode dans le contentieux en cassant partiellement la décision d’appel ; elle relève que la Commune démontrait bien que les marques attaquées avaient été déposées dans la seule intention de nuire.

L’affaire a finalement été jugée le 5 mars dernier par la Cour d’Appel de Paris (Cour de renvoi) qui a donné raison au village aveyronnais considérant que les marques litigieuses auraient été déposées « par fraude » dans le cadre d’une « stratégie visant à priver la commune de Laguiole et ses administrés de l’usage du nom ». Outre la nullité des 20 marques déposées, la commune de Laguiole obtient une indemnisation à hauteur de 50 000 euros au titre du préjudice moral subi. La Cour estimant que la Commune avait été privée de son nom et qu’il avait été porté atteinte à sa réputation.

Notons que pour lutter contre ce type de pratiques, la loi Hamon du 17 mars 2014 avait déjà doté les collectivité territoriales de nouveaux moyens de défense en leur permettant d’être alertées par l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) de tout dépôt d’une demande d’enregistrement de marque incorporant le nom de la commune ou une dénomination similaire et en leur donnant droit de s’opposer à son enregistrement.

Cette saga judiciaire rend bien compte de la difficulté à protéger le nom d’une collectivité territoriale face à une marque concurrente. Une décision qui pourrait donc révéler la volonté des juges de protéger les intérêts locaux et le « Made in France ».

Attention, décision à nuancer cependant ; certaines marques Laguiole restent présentes sur le marché et l’entrepreneur a encore la possibilité de former un nouveau pourvoi en cassation…

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