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Fiscalité | Droit d'enregistrement - Pacte Dutreil

Appréciation des conditions de mise en œuvre d’un Pacte Dutreil en cas de réalisation d’une activité mixte commerciale et de location immobilière.

Par une décision en date du 25 janvier 2023, la Cour de cassation (Cass. Com., 25 janvier 2023, n°20-23.137) a donné une illustration du principe posé en 2020 par le Conseil d’Etat (CE, 8e et 3e ch., 23 janv. 2020, n° 435562) et qu’elle avait adopté par la suite (Cass. Com., 14 octobre 2020, n°18-17.955), selon lequel l’appréciation du caractère prépondérant de l’activité de la société, dans le cadre de la mise en œuvre d’un Pacte Dutreil, ne s’apprécie pas uniquement au regard du chiffre d’affaires et de la valeur des actifs, mais s’apprécie en considération d’un faisceau d’indices.

Pour mémoire, l’article 787 B du Code général des impôts (CGI) dispose que l’exonération partielle à hauteur de 75% des droits de mutation à titre gratuit fondée sur la mise en place d’un Pacte Dutreil requiert l’exercice par la société concernée d’une activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale. Il est toutefois possible de bénéficier de ce régime fiscal de faveur même si la société dont les titres sont donnés exerce une activité mixte commerciale et civile, si l’activité commerciale est prépondérante.

La jurisprudence relative à l’appréciation de cette condition a concerné, jusqu’à présent, le cas des sociétés holdings animatrices de groupes mais est susceptible d’apparaître dans d’autres situations que des holdings comme le démontre cette décision.

Au cas d’espèce, un contribuable a hérité des actions d’une société ayant deux activités commerciales et une activité de location de biens immobiliers. Lors de l’établissement de la succession, l’héritier s’est prévalu de l’abattement de 75% prévu par l’article 787 B du CGI. L’administration fiscale a contesté l’application du régime Dutreil, car elle a considéré que la société avait une activité à prépondérance civile. Les juridictions du fond ont donné raison à l’administration fiscale, au motif que sur les exercices précédant le décès, le chiffre d’affaires procuré par l’activité immobilière de la société représentait une part majoritaire du chiffre d’affaires total, et que l’actif qui y était affecté représentait également la majorité de l’actif réévalué de la société.

En se basant uniquement sur ces deux critères de chiffre d’affaires et de valeur d’actif, l’administration fiscale et les juridictions du fond ont appliqué l’ancienne doctrine administrative (1) qui précisait que le caractère prépondérant de l’activité s’appréciait au regard de deux conditions cumulatives (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10, du 12 septembre 2012, n°20) :

– le chiffre d’affaires procuré par l’activité éligible devait représenter au moins 50 % du montant du chiffre d’affaires total ; et
– le montant de l’actif brut immobilisé devait représenter, en valeur réelle actualisée, au moins 50 % du montant total de cet actif brut.

En cassant cette décision pour erreur de droit, la Cour de cassation rappelle que l’administration fiscale doit obligatoirement apprécier l’ensemble des éléments de faits de nature à prouver le caractère prépondérant de l’activité civile et non pas seulement les deux critères décrits ci-dessus. Ainsi, en plus des critères de l’actif et du chiffre d’affaires, les éléments de contexte particulier à chaque situation pourraient être pris en considération pour apprécier la prépondérance de l’activité. Il pourrait s’agir par exemple de l’utilisation de la mobilisation humaine (temps de travail affecté à chaque activité avec un suivi des temps ou encore le cout salarial) ou encore les liens opérationnels entre les différentes activités.

Il est intéressant de noter que si l’administration fiscale a pris acte de ces évolutions et a mis en conformité sa doctrine pour retenir en priorité une approche en fonction d’un faisceau d’indices (BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10, 21 décembre 2021, § 20), il est admis à titre de règle pratique qu’une société dont l’activité commerciale respecterait uniquement ces critères de chiffre d’affaires et d’actif brut puisse considérer cette activité comme étant prépondérante.

(1) Annulé par le Conseil d’Etat saisi d’un recours pour excès de pouvoir (CE, 8e et 3e ch., 23 janv. 2020, n° 435562).
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Photo par Nil Castellví sur Unsplash
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