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Déductibilité des honoraires versés au titre d’une convention de management fees

Le Conseil d’État, dans un arrêt du 4 octobre 2023, a validé la déductibilité des honoraires versés au titre d’une convention de management fees en cas de dirigeant commun.

Les conventions de management fees sont des accords conclus entre sociétés ayant un dirigeant commun ou faisant partie d’un même groupe et qui définissent les prestations rendues et la rémunération qui y sera attachée.

En général, les prestations portent sur les services financiers, comptables, juridiques, fiscaux et administratifs.

Il y a 20 ans, la Cour Administrative d’Appel de Nancy, dans son arrêt SA Gamlor (CAA du 9-10-2003, n°98-2182), posait le principe selon lequel ne pouvait être regardé comme relevant d’une gestion normale le fait pour une filiale de verser à sa société mère des honoraires au titre de prestations de management réalisées par un dirigeant commun de ces deux sociétés, dès lors que ces prestations ne pouvaient être regardées comme distinctes de celles incombant au dirigeant de cette filiale à raison de son mandat social.

Les conséquences fiscales d’une telle remise en causes sont importantes et notamment, en matière d’imposition des bénéfices, le rejet de la déductibilité des sommes versées au titre de la convention de management fees sur le fondement de l’acte anormal de gestion et, en matière de TVA, le rejet de la déductibilité de la TVA sur les prestations facturées.

Il ressort de cette jurisprudence, suivie ultérieurement par de nombreuses juridictions du fond, que le dirigeant d’une société doit exercer ses fonctions de direction et que les prestations visées dans la convention doivent être distinctes de celles du mandat social.

Dès lors, dans une convention de management fees, il doit être effectué une distinction claire entre les prestations purement techniques qui pourront être facturées, et les prestations qui correspondent aux fonctions incombant normalement au dirigeant qui ne pourront pas l’être.

Dans une décision du 4 octobre 2023, le Conseil d’État a jugé que, sous réserve du respect de certaines conditions, une société peut, sans commettre un acte anormal de gestion, conclure une convention par laquelle elle rémunère une société afin que le gérant de l’une, également gérant de l’autre, exerce les fonctions de direction de la société versante.

En l’espèce, la société C, soumise à l’impôt sur les sociétés, a versé des honoraires à la société S à raison de prestations réalisées par un dirigeant commun, Mr A. Mr A était gérant non rémunéré de la société C et associé et co-gérant de la société S.

L’administration fiscale avait remis en cause la déduction des honoraires versés par la société C à la société S au motif que leur versement relevait d’une gestion anormale.

La Cour administrative d’appel de Marseille (CAA Marseille du 23-6-2022, n°19MA04862) s’était ralliée à la position de l’administration fiscale en reprenant les principes dégagés dans l’arrêt SA Gamlor. La Cour a retenu que les prestations réalisées par la société S relevaient des fonctions inhérentes à celles d’un gérant et qu’elle n’a fourni aucune prestation de service distincte des activités incombant normalement au gérant de la société C en raison de son mandat social.

Dans cette affaire, le Conseil d’État a été amené à se prononcer sur la déductibilité par une société d’honoraires versés à une seconde société pour des prestations de direction rendues par leur dirigeant commun.

Le Conseil d’État juge que la conclusion par une société d’une convention de prestations de services avec une autre société pour la réalisation, par le dirigeant de la première, de missions relevant des fonctions inhérentes à celles qui lui incombent normalement, ne relève pas d’une gestion anormale à condition que la décision de la société de rémunérer ainsi indirectement son dirigeant soit délibérée. La société doit donc établir que ses organes sociaux compétents ont entendu rémunérer indirectement le dirigeant.

Le Conseil d’État précise également que le choix d’un mode de rémunération indirecte, c’est-à-dire par le versement d’honoraires à la société prestataire de services, ne caractérise pas en soi un appauvrissement de la société versante à des fins étrangères à son intérêt, démonstration qui aurait été nécessaire pour caractériser un acte anormal de gestion.

Dans cette décision, le Conseil d’État revient sur une jurisprudence ancienne en permettant, sous condition, la déductibilité des honoraires versées au titre d’une convention de management fees en cas de dirigeant commun.

Néanmoins, la mise en œuvre de ces conventions doit faire l’objet d’une attention particulière compte tenu des risques et incertitudes qui y sont attachés.
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Pour toute question relative aux management fees, contactez notre équipe Droit Fiscal.

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Philippe Schmidt
Johanna Segalis
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Photo par pch.vector sur Freepik
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