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L'exploitation des droits de marques [de Frida Kahlo] : do's and don'ts

La saga judiciaire opposant les ayants-droits de Frida Kahlo à la Frida Kahlo Corporation, la société de commercialisation des visuels à l’effigie de la peintre depuis 2004, continue ! Notre équipe Propriété Intellectuelle fait le point sur les derniers épisodes, et les leçons à en tirer.

Depuis plusieurs années, les ayants-droits de la célèbre artiste-peintre Frida Kahlo considèrent que le contrat de cession de marques, conclu en 2004 avec la Frida Kahlo Corporation, serait régulièrement violé.

En effet, selon eux, la Frida Kahlo Corporation exploiterait l’image et le nom de Frida Kahlo pour désigner des produits qui ne relèveraient pas du champ contractuel.

Tandis que, toujours selon eux, l’accord déterminerait et limiterait les catégories de produits pour lesquelles l’image et le nom de Frida Kahlo pourraient être exploités, la Frida Kahlo Corporation considère quant à elle que l’accord ne prévoirait aucune limitation matérielle – en termes de types de produits – ni territoriale.

Cette différence d’interprétation du contrat a conduit la Frida Kahlo Corporation, depuis 2004, à déposer – et à exploiter – l’image et le nom de l’artiste à titre de marques sans aucune limitation, et à contracter des licences de ses marques au profit de tiers, dans le monde entier.

Le dernier épisode en date concerne la collaboration de la Frida Kahlo Corporation avec la Société de fast-fashion chinoise SheinFrida Kahlo x Shein »), dans le lancement et la commercialisation d’une collection de vêtements et d’accessoires de mode exploitant l’image et le nom, à titre de marque, de « Frida Kahlo ».

Ce conflit est l’occasion de rappeler l’importance de conclure des contrats construits et clairs, conformes au droit applicable et à la volonté des parties.
En matière de contrats de cession et de licence des marques, le Code de la propriété intellectuelle prévoit des dispositions spécifiques. Comme tout contrat toutefois, outre les modalités légales, des conditions purement contractuelles – de gré à gré – sont à prévoir. Le contrat faisant loi entre les parties, il est essentiel d‘anticiper les écueils.
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Le contrat de cession de marques est le contrat par lequel le titulaire d’une marque, enregistrée ou déposée, transmet (en principe) à un tiers à titre onéreux ses droits sur la marque, pour tout ou partie des produits et services qu’elle désigne (article L.714-1 du Code de la Propriété Intellectuelle).

Que doit contenir le contrat de cession d’une marque ?

Le contrat de cession de marque doit notamment :

– Identifier la marque ou la demande de marque concernée,

– Identifier les parties, i.e. le titulaire de marque (le cédant) et le bénéficiaire de la cession (le cessionnaire),

– Identifier les produits et services faisant l’objet de la cession. Ce point est parfois minimisé. Toutefois, les droits détenus sur une marque étant démembrables, il est possible de prévoir une cession partielle de marque, i.e. limitée à certains produits et/ou services. Des diligences spécifiques sont à effectuer auprès de l’Office des marques compétents, afin d’inscrire ladite cession partielle. Ceci étant, en pratique, dans l’hypothèse où le cessionnaire exploiterait la marque hors du champ contractuel, il pourrait alors lui être reproché des faits de contrefaçon et/ou de concurrence déloyale, en vertu du principe de spécialité en droit des marques.

– Identifier l’étendue territoriale, laquelle couvre la nationalité de la marque, lorsqu’elle est nationale. Elle peut être régionale, si la marque est régionale.

– La contrepartie de la cession (qui peut être à titre gratuit),

– Indiquer la date d’entrée en vigueur de la cession. A compter de cette date, le cessionnaire est subrogé au cédant dans ses droits – et devoirs – attachés à la marque. Il lui appartient ainsi, notamment, de veiller au maintien en vigueur de sa marque, de l’exploiter sérieusement pour éviter d’encourir la déchéance, de défendre sa marque en cas de litige. Il peut également être tenu comme responsable, sauf dispositions contractuelles contraires, de faits de contrefaçon et/ou de concurrence déloyale qui trouveraient leur fondement dans la marque acquise.

En l’espèce,
Le litige opposant les ayants-droits de Frida Kahlo à la cessionnaire desdits droits, trouve son origine dans les limites matérielles de la cession, lesquelles sont interprétées différemment par les parties en présence.

Un contrat de licence aurait pu être envisagé, par les ayants-droits de Frida Kahlo, afin de faciliter le contrôle de l’exploitation des marques cédées.

Le contrat de licence de marques est le contrat par lequel le titulaire d’une marque consent à un tiers, généralement à titre onéreux, une autorisation (exclusive ou non) d’exploitation de la marque, pour tout ou partie des produits et services qu’elle désigne, et pour tout ou partie du territoire où cette marque est protégée (article L.714-1 CPI).

Que doit contenir le contrat de licence de marques ?

Le contrat de licence de marque doit notamment :

– Identifier la ou les marques concédées en licence,

– Identifier les parties, i.e. le titulaire de marque (le concédant) et le bénéficiaire de la licence (le licencié),

– Identifier les produits et services faisant l’objet de la licence (la licence peut porter sur une partie des produits et services désignés par la marque concédée en licence),

– Identifier l’étendue territoriale, laquelle couvre la nationalité de la marque, lorsqu’elle est nationale. Elle peut être régionale, si la marque est régionale,

– Indiquer la contrepartie de la licence (gratuite ou onéreuse) et les modalités de calcul et de paiement de celle-ci, voire prévoir un minimum garanti,

– Indiquer la date d’entrée en vigueur et la durée de la licence. Préciser le caractère exclusif ou non de la licence,

– Préciser la possibilité, pour un licencié non exclusif, de prendre l’initiative d’une action judiciaire en contrefaçon en l’absence d’action du concédant (le licencié exclusif à cette faculté, sous réserve de respecter une procédure particulière préalable).
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Outre la question des conditions et modalités de transfert de droits sur une marque,
L’affaire opposant les ayants-droits de la Frida Kahlo Corporation est toutefois plus large qu’une question de marque.
Elle touche en effet un point essentiel selon nous dans l’appréhension qui doit en être faite : l’exploitation, à titre de marque, d’attributs de la personnalité (patronyme, image).

Des garde-fous sont nécessaires, afin de réduire le risque de conflit sur ces sujets qui touchent aux personnes mêmes & leurs ayants-droits.

Notre équipe reste à votre disposition pour vous accompagner, au plus près, dans la mise en place des contrats, ayant pour objet notamment l’acquisition et l’exploitation de marques, dessins et modèles et brevets, et des contrats commerciaux y attachés selon la nature des relations contractuelles envisagées. 

Photo par Nasim Keshmiri sur Unsplash
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